Ruth AMOSSY, Eithan ORKIBI (éds), Ethos collectif et identités sociales

di | 6 Luglio 2022

Ruth AMOSSY, Eithan ORKIBI (éds), Ethos collectif et identités sociales, Paris, Classiques Garnier, 2021, pp. 220.

Enjeu essentiel de l’époque contemporaine, la présentation de soi acquiert une dimension centrale dans la sphère aussi bien publique que privée. C’est cette notion qui fait l’objet d’Ethos collectif et identités sociales, qui l’aborde sous une dimension particulière, peu explorée par les travaux sur l’argumentation et sur l’analyse du discours : l’image qu’une instance de locution plurielle donne de soi et construit dans son discours. Comme Ruth AMOSSY et Eithan ORKIBI le soulignent dans l’Introduction (pp. 7-17), ce volume tire son inspiration de la notion d’« ethos collectif » introduite par Orkibi en 2008. Il est question de l’image plurielle d’un groupe qui s’affirme en tant que collectif aux yeux des autres, à l’égard d’une entité représentant une notion culturelle plus ou moins concrète. C’est cette entité qui permet à l’ensemble d’acquérir une existence publique et de le supporter dans une visée par laquelle l’« ethos collectif » s’affirme comme arme de persuasion mais aussi et surtout comme raison d’être du collectif, assurant son existence, son édification et sa construction vis-à-vis des autres. L’« ethos collectif » peut donc être étudié sous deux dimensions : d’une part, ses modalités de construction, et de l’autre, les diverses fonctions qu’il peut remplir – constitutive ; identitaire ; de rassemblement ; de polarisation ; de positionnement ; de persuasion ; de promotion ; de réparation. C’est l’ensemble de ces aspects et de ces fonctions qui sont abordés dans cet ouvrage riche et composite, organisé autour de huit contributions rassemblées autour de quatre sections et se terminant par un Index des notions (pp. 211-213), par les résumés des contributions en français (pp. 215-217) et par la Table des matières (pp. 219-220).

La première partie, Enjeux théoriques (pp. 18-71), réunit les réflexions de Ruth AMOSSY et de Dominique MAINGUENEAU à propos des notions d’« ethos collectif » et d’« ethos collectif représenté », respectivement.

Plus en détail, dans Qu’est-ce que l’ethos collectif ? Sciences du langage et sciences sociales (pp. 20-51), Ruth AMOSSY part de la définition d’« ethos collectif » en rhétorique et en analyse du discours pour la comparer à celles qui sont proposées par les sciences sociales (la sociologie, la psychologie sociale, l’ethnographie de la communication). C’est à partir des points de contact et des différences entre ces approches que l’auteure aborde par la suite l’« ethos collectif » en tant que construction verbale et ses différentes conceptions – des sciences sociales à la rhétorique – pour essayer d’établir un pont entre celles-ci. Elle souligne que si les deux pans identitaire et persuasif sont le propre du « locuteur collectif » qui sous-tend la notion d’« ethos collectif » en rhétorique et en analyse du discours, les traits que les sciences sociales associent à l’« ethos collectif » consistent plutôt en des représentations et dispositions de groupe – tel est le cas des approches de Weber, d’Elias et de Bourdieu –, en des croyances partagées – il en est ainsi de la psychologie sociale – ou en des configurations émotionnelles standardisées – comme le montrent les travaux de Brown et Levinson –, autrement dit des « propensions » (p. 31) qui permettent de réguler des comportements. Ce cadre est complété par les travaux de Kerbrat-Orecchioni, qui sont évoqués pour souligner l’intégration de la perspective discursive à l’ethos telle qu’elle est abordée par les ethnographes de la communication. La seconde partie de cette contribution s’intéresse au « nous » sous-tendant l’« ethos collectif » dans la rhétorique et dans l’analyse du discours. À cet effet, l’analyse discursive et argumentative du fragment initial de la déclaration collective du 16 mars 2019 des Gilets jaunes de Poitiers permet à AMOSSY d’examiner l’« ethos collectif » et donc l’image de soi, le « locuteur collectif » et le « nous » mais aussi les tensions que cela peut engendrer. Cet article d’ouverture montre ainsi que l’« ethos collectif » remplit un rôle particulier en rhétorique et en analyse du discours en termes de volonté d’émergence, de promotion et/ ou de renforcement d’un groupe social, en tant que fruit d’un projet et d’une décision au service d’une visée.

En poursuivant l’analyse de la notion d’« ethos collectif », Dominique MAINGUENEAU pose la distinction entre un « ethos collectif primaire », émanant directement des discours des groupes eux-mêmes, et un « ethos collectif représenté », donc secondaire. C’est ce dernier type d’« ethos collectif » et la manière de le représenter dans divers genres de discours qui sont examinés dans cet article (L’ethos collectif représenté, pp. 53-71). Son point de départ est représenté par les « énonciations groupales » dont un énonciateur peut se servir pour rapporter les propos de locuteurs d’énonciations distinctes en les synthétisant. Des exemples tirés des récits des historiens, de la littérature et de la presse permettent à MAINGUENEAU de souligner le rôle joué par le discours indirect et le discours indirect libre dans ce type d’énonciation, ainsi que la manière d’y intégrer le discours direct par le biais d’aphorisations. Pour envisager l’énonciation représentée secondaire, par laquelle un locuteur individuel est institué comme prototypique par une collectivité, l’auteur emploie les monologues comiques modernes de Coluche et le théâtre classique. Ainsi, Les précieuses ridicules de Molière, notamment l’opposition entre un ethos partagé et un anti-ethos au sein de la collectivité des précieuses, et les Provinciales de Pascal, où est mis en évidence l’ethos du bon père comme étant représentatif des jésuites – le but étant dans les deux cas la disqualification des personnages prototypiques concernés –, sont comparées avec des contextes où une distinction entre « ethos individuel » et « ethos collectif » est plus douteuse. Tel est le cas de certains personnages de roman. L’analyse de ces exemples d’ethos représenté met en exergue la primauté du point de vue de l’énonciateur dominant, qui marque une distance par rapport au groupe dont il met en scène l’ethos. La dernière partie de cette contribution s’appuie sur des cas d’énonciations représentées prototypiques dans les sciences sociales. Il s’agit de l’Homo academicus de Pierre Bourdieu, qui montre l’opposition entre le groupe des universitaires – les « lettrés » – et celui des contestataires, et de journalistes de reportages de la presse nationale qui se rendent à la campagne pour examiner le groupe des « provinciaux ». MAINGUENEAU souligne ainsi que l’analyste du discours doit examiner des énoncés présentés comme collectifs et les aborder du point de vue des contraintes discursives et des propriétés linguistiques qui les caractérisent.

La deuxième partie, L’image collective des institutions et des entreprises (pp. 73-119), s’ouvre par la contribution de Francesco ATTRUIA, intitulée Identité(s) et réparation d’image. De l’ethos institutionnel de la Commission européenne à l’ethos communautaire des Européens (pp. 75-96). Il examine une interview de Marianne Thyssen, Commissaire européenne 2014-2019 au sein de la Direction Générale Emploi, affaires sociales et inclusion au magazine Agenda social (journal officiel de cette Direction), au sujet de l’emploi et de la mobilité professionnelle. L’analyse porte sur les stratégies énonciatives et argumentatives qui sont utilisées par la Commissaire en vue, enfin, de réparer l’image des institutions européennes à un moment où l’Europe ne jouit pas de crédibilité et de confiance auprès des parties prenantes. À l’appui d’une perspective pragma-rhétorique, il émerge de l’analyse des réponses de l’interviewée que le choix d’intégrer la parole protestataire à son propre discours est utilisé pour mieux proposer un contre-discours s’opposant aux jugements souverainistes et aux préjugés sur l’UE de la part de ses citoyen-ne-s. Or, malgré la tentative de la Commissaire de revaloriser les institutions européennes et d’invalider ce qui s’est établi dans les mentalités des citoyen-ne-s, deux identités distinctes persistent. D’une part, l’identité d’un endogroupe institutionnel, stable et défini ; d’autre part, l’identité d’un exogroupe communautaire, flou et instable, composé des Européen-ne-s, qui continuent à s’identifier de manière partielle et incertaine avec l’UE. C’est pourquoi, dans ses conclusions, ATTRUIA confirme que le discours de la Commissaire restitue l’image d’une collectivité qui n’existe en fait qu’en puissance.

La seconde contribution de cette section aborde la réparation d’image dans le domaine des affaires et des entreprises. Keren SADOUN-KERBER emploie une démarche de micro-analyse centrée sur le jeu des pronoms personnels et des parallélismes discursifs pour examiner l’image d’entreprise en vue d’une réparation d’image collective (Crise médiatique et réparation d’image. Le cas d’Israel corp., et des frères Ofer, pp. 97-119). À partir de l’étude de cas du conglomérat des deux frères Ofer en Israël, Israel corp., et du film que ceux-ci ont commandité en tant que droit de réponse à un film documentaire de 2008 les accusant lors d’une enquête journalistique, l’auteure analyse la manière dont cette entreprise exerce son droit de réponse en discours en vue de réparer, entre autres, l’image de ses propriétaires. En particulier, trois niveaux de l’« ethos collectif » sont mobilisés : un « ethos collectif » personnel – celui des frères Ofer – ; un « ethos collectif » organisationnel, visant la construction de l’image méliorative de l’entreprise comme collectivité unifiée et bienfaisante ; un « ethos collectif » culturel attaché à des valeurs pouvant susciter l’identification du plus grand nombre à l’entreprise et à ses valeurs, parmi lesquelles le patriotisme et l’amour pour son propre pays. Les conclusions de SADOUN-KERBER témoignent, par le biais des retombées médiatico-sociales du cas d’étude examiné, de la difficulté d’unifier les différentes voix dans le cadre de rapports de force qui engendrent des « ethè collectifs » qui se recoupent.

La troisième partie du volume, Images de groupe. Discours de revendication et action collective (pp. 121-168), s’ouvre par la contribution de Jürgen SIESS (Analyse d’un ethos collectif ‘genré’. Pétitions d’hommes, pétitions de femmes (1788-1798), pp. 123-144). Son étude porte sur l’« ethos collectif » « genré » des femmes en tant que collectif au XVIIIe siècle, à partir d’une comparaison entre quatre pétitions collectives à dominante politique et sociale, dont deux sont rédigées par des femmes et deux sont rédigées par des hommes. Si le genre de la pétition collective rédigée par des hommes est établi, ce genre est pour les femmes en voie de constitution et conçu en opposition avec le masculin. D’où son caractère identitaire pour servir la cause des revendications des pétitionnaires, qui réclament l’envoi de députées à l’Assemblée nationale et l’égale représentation des femmes et des hommes en son sein, respectivement. Les deux pétitions signées par les femmes montrent que la construction de l’identité collective des femmes est basée, par contraste, sur celle des hommes. Si la pétition sur l’envoi de députées à l’Assemblée marque la loyauté d’un « nous » restreint, genré, à l’égard de la monarchie, inspiré par un principe hiérarchique façonné par le seul affect, la seconde pétition des femmes est fondée sur un dissensus radical à l’égard du statu quo. Elles visent en effet à le renverser par une stratégie argumentative sur la rétorsion, afin de fournir des preuves à l’appui de la thèse de l’ouverture de l’espace public aussi bien aux hommes qu’aux femmes – qui doivent par ailleurs y remplir les mêmes fonctions. Ce discours a ainsi vocation à servir la cause de toutes les femmes et à mettre en exergue que ces qualités leur permettent de sortir de la sphère privée : l’image des hommes y est détériorée au profit d’une image méliorative du genre féminin, et c’est à cette image qu’est attachée également celle de révolutionnaires, en tant que porte-paroles d’un collectif radical. L’étude discursive de ces pétitions permet donc d’identifier la manière dont un groupe peut construire un « ethos collectif » à valeur identitaire différent de sa reconnaissance préalable pour persuader et demander une redistribution des rôles et des pouvoirs.

Pour sa part, Laura Cristina BONILLA NEIRA examine le contexte colombien, notamment les moyens discursifs déployés par les partisans du Non au référendum sur l’approbation de « L’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable » de 2016 négocié et signé entre le gouvernement et la guérilla des forces armées révolutionnaires de Colombie (La « Résistance civile » à l’accord de paix en Colombie. Mobilisation et construction d’un ethos collectif,pp. 145-168). Après avoir présenté le cadre politique de ce référendum, promu par l’ancien Président de la République Alvaro Uribe et par son parti Centre Démocratique (CD), réclamant une « Résistance Civile », l’auteure explique les controverses liées au nom donné à ces revendications, qui avait désigné d’autres groupes, minoritaires, luttant pour le droit à la dignité humaine, à l’autonomie et à l’autodétermination. Au contraire, la « Résistance Civile contre l’Accord » vise à donner visibilité et légitimité à l’opposition contre le gouvernement en place via une action de rue et sur les réseaux sociaux conduite par une partie de l’élite politique du pays. L’analyse est effectuée à partir du discours de la « Résistance Civile » circulé sur le profil Facebook pour examiner la construction d’un « ethos collectif » permettant de consolider l’identité collective de ce groupe. Trois temps sont identifiés par BONILLA NEIRA : la construction d’un « nous » à la fois inclusif et élargi en vue de fédérer les indécis et de consolider une image collective ; la dissociation des notions de résistance, paix et justice via un clivage des notions servant à redéfinir ces concepts pour consolider le discours oppositionnel par un retravail de l’ethos de nature collective ; la construction de l’image de l’adversaire politique en tant qu’ennemi – « ils », à savoir les Forces armées révolutionnaires de Colombie et le président Santos, considérés à la fois comme un collectif, un seul adversaire et l’autre négatif – en opposition avec le renforcement du « nous ». Dans ses conclusions, l’auteure remarque que le profil Facebook analysé, où on voit la construction de l’image de l’adversaire par le biais d’une opération de consolidation de l’« ethos collectif », jette les bases du discours qui sera développé lors de la campagne officielle pour le Non au référendum.

Le quatrième volet, qui clôt également le volume, aborde l’image de soi dans le cadre des stratégies d’avant-garde (Image de soi et stratégies d’avant-garde, pp. 169-209).

Dans Signaux d’avant-garde. Mouvements culturels, altruisme et principe de handicap (pp. 171-192), Nana ARIEL présente une conception pragmatique de l’avant-garde comme ethos de collectifs culturels à partir de la « théorie du handicap » d’Amotz Zahavi. D’après celle-ci, les individus se servent de signaux pour transmettre des informations concernant leurs propres caractéristiques cachées. Dans le cas de collectifs qui se veulent avant-gardistes, ces signaux peuvent apparaître sous forme collective et être représentatifs de l’ethos de la totalité du groupe. Parmi les « handicaps » affichés par les membres de ces groupes d’avant-gardistes, l’auteure identifie les principes de l’altruisme, de la contrainte, de la sincérité, à savoir des moyens de signalement qui permettent de construire un ethos fiable. Les approches essentialiste, historique et sociologique des avant-gardes sont évoquées pour se pencher sur le mouvement contemporain pour une « écriture littéraire participative ». S’inscrivant contre une conception « traditionnelle » et historisante d’avant-garde liée à un phénomène vague et restreint, l’approche sociologique permet de concevoir l’avant-garde comme une construction sociale plus étendue, en vue d’obtenir un statut social et d’attacher à l’avant-garde une pratique fondamentale de « distinction » non essentialiste. C’est par l’analyse du discours que l’avant-garde peut construire son ethos, lequel est d’après l’auteure le résultat d’actes de répétition plutôt que de différenciation. Ces prémisses théoriques permettent d’examiner différents cas d’avant-gardes contemporaines et les divers signaux à transmettre à l’auditoire. Ces signaux relèvent surtout de l’acceptation d’une charge, du sacrifice de soi, de l’altruisme, et comportent un potentiel heuristique de construction identitaire qui s’alimente également des réminiscences de l’avant-garde stéréotypée relevant de l’approche historique. L’étude de cas porte sur le groupe israélo-palestinien avant-gardiste Shetef, qui permet à ARIEL de mieux examiner le signalement de l’altruisme artistique et la notion d’« ethos collectif » par rapport à un collectif peu stable et non homogène qui partage un ensemble de signaux consolidé, dont les manifestations reposent sur la technologie collaborative, l’économie collaborative, les jeux de collaboration, les initiatives d’écriture participative, le caractère expérimental des productions, la fragmentation des textes typique du genre poétique. Dans ses conclusions, ARIEL souligne que l’approche pragmatique des avant-gardes a le mérite de s’intéresser à la façon dont celles-ci sont activées dans le discours et dans de nouveaux contextes par le biais de prémisses disciplinaires différentes.

La dernière contribution, rédigée par Colette LEINMAN, explore l’avant-garde artistique en vue de la construction de l’« ethos collectif » du surréalisme par le biais d’une analyse discursive et argumentative d’un corpus verbo-pictural : des catalogues d’expositions surréalistes publiés entre 1924 et 1939 (Construire l’ethos collectif du groupe surréaliste. Les catalogues d’exposition, pp. 192-209). À partir du premier Manifeste surréaliste d’André Breton de 1924, l’auteure considère les catalogues d’expositions comme un moyen de valoriser la dimension collective du groupe, dont la représentation est homogène et s’appuie sur des procédures discursives spécifiques. Parmi ces procédures, LEINMAN s’intéresse au mode de création littéraire de l’écriture automatique – défini « terrorisme stylistique » ­–, à l’effacement de l’artiste au profit du groupe pour valoriser l’idée de fusion des consciences d’une collectivité, au rôle de l’auteur du catalogue comme porte-parole du groupe et à la pratique soutenue de l’autocitation qui engendre un sentiment de supériorité auprès des artistes cités. Le discours des catalogues mobilise une rhétorique de polarisation par laquelle une double stratégie d’attraction et d’identification au groupe, et d’exclusion est mobilisée. Au terme de son analyse, l’auteure constate que, face à l’incompréhension, voire le rejet, du public et à la lutte pour se positionner dans le champ artistique de l’époque, le catalogue d’exposition des artistes surréalistes devient une inspiration du discours manifestaire pour combattre les techniques traditionnelles au profit d’une vision de la création artistique comme source de vie soudant les membres restreints d’un groupe qui opère dans une société en mouvement.

Le dénominateur commun des huit contributions réunies dans les quatre sections d’Ethos collectif et identités sociales est le rôle essentiel de la notion d’« ethos collectif » dans la compréhension de dynamiques culturelles et sociopolitiques plurielles. Cette pluralité de dynamiques permet ainsi de rendre compte des différents domaines de la vie sociale où la notion d’« ethos collectif » se développe en tant que fruit des enjeux posés par les identités sociales qui la façonnent.

[Alida M. SILLETTI]

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