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Marie Cosnay : pratiquer l'engagement littéraire à travers les TIC

Anna FOCHESATO



Résumé

L'empirement des conditions de sujets désavantagés dans un contexte global de crise demande, aujourd'hui, un effort de réaction de plus en plus grand. Communication, échange, débat deviennent alors les mots d’ordre du parcours à entreprendre et des formes d’action envisageables. La littérature se nourrit de mots, elle tourne autour de la capacité du langage de mettre en relation les individus et peut répondre, donc, à cette exigence pressante. Cet article porte sur la recherche de dialogue, de partage et de confrontation relativement à la politique française de l'immigration mise en place par l'écrivaine bayonnaise Marie Cosnay aussi à travers les nouvelles technologies : dans le contexte de sa pratique engagée de la littérature, ces derniers représentent, en effet, non seulement des moyens de libération des subjectivités mais encore des fabricants de liens, des lieux de confrontation virtuelle.

Abstract

Nowadays, the worsening conditions of disadvantaged people in a global context of crisis request a constantly increasing effort. Therefore communication, exchange, debate become the watchwords of the path to be taken as well as possible ways of action. Since literature thrives on words and is based on the ability of language to connect people, it can respond to this urgent requirement. This article focuses on the work of Marie Cosnay, who seeks to share her feelings as well as to establish a dialogue and a confrontation about French immigration policy by using digital technologies: in the context of her engaged practice of literature, blogs and e-mails become a means to express interior worlds and they help to build connections.

« (…) S’il demeure pour quelques-uns urgent d’écrire, c’est qu’il y va aussi d’un dérangement dans la conscience d’être au monde. Chaque période de l’histoire suscite un état du monde ou de la conscience, une qualité d’expérience ou une forme d’existence que les productions de la culture n’ont encore jamais traduits. (…) La littérature ne se donne certes pas pour tâche de résoudre ces questions, mais ne se résigne pas à les laisser silencieuses (…) » [VIART, VERCIER et EVRARD, 2008:13].


1. Une littérature déconcertante

Sur la scène littéraire de l'extrême contemporain un éventail d’auteurs et de titres composent une littérature définissable comme « déconcertante », « qui ne cherche pas à correspondre aux attentes du lectorat mais qui contribue à les déplacer (…), qui se pense, explicitement ou non, comme activité critique, et destine à son lecteur les interrogations qui la travaillent » [VIART, VERCIER, 2008 : 11]. Dans la constitution de cette tendance, les années 1970 prennent la forme d'un tournant, car, depuis, la tangibilité du réel, dans son visage passé ou bien présent, est devenue un sujet prédominant de création, exploité par les auteurs pour réfléchir sur la complexité de la société actuelle, qu’ils ne cessent d’interroger surtout en référence à ses failles et ses échecs. L'écrivain cherche de cette façon à bousculer les idées, à remettre en cause les certitudes et « donne à voir (…) les zones d’ombre, la face noire de nos sociétés » [PRSTOJEVIC, 2011].

Une telle pratique du littéraire repose sur une conception de la littérature en tant qu'acte de communication et c'est dans ce cadre qu'on propose d'interpréter l'utilisation par nombre d'écrivains des technologies digitales qui caractérisent l'époque actuelle : en effet, loin de ne représenter qu'une vitrine littéraire, ces dernières sont à même de rapprocher les deux instances de l'auteur et du lecteur sur un plan aussi bien spatio-temporel que socio-culturel. Un exemple fort pertinent en ce sens est constitué par le blog de François Bon (http://www.tierslivre.net/), qui représente un véritable lieu de rencontre entre l'écrivain et ses lecteurs, le premier organisant même des ateliers d'écriture en ligne pour le public. Le Web se situe évidemment à la base d'une telle révolution. En s'inspirant de la définition élaborée par J.-M. Leveratto et M. Leontsini [2008 : 119], on peut d'ailleurs considérer ce dispositif sociotechnique comme un équipement à la fois culturel, social et de manifestation individuelle : en effet, si la Toile est indéniablement un réservoir de données en ligne que l'on peut interroger pour obtenir satisfaction d'un défaut d'information, elle a aussi le pouvoir de joindre les personnes en leur permettant de maintenir et parfois renforcer des relations sociales déjà existantes ou d'en nouer de nouvelles, tout en offrant à chacun une multiplicité d'occasions de se montrer en tant que sujet. En ce sens, donc, Internet constitue un moyen de fabrication de réseaux.

C'est justement sur le pouvoir relationnel de la Toile que l'on se focalisera dans le présent article. Le but est en effet celui d'analyser l'exploitation des nouvelles technologies par l'écrivaine Marie Cosnay,1 dont l'œuvre se situe pleinement dans le contexte d'une littérature transitive,2 qui trouve son origine dans la matérialité de la réalité contingente et qui, par le truchement d'une multiplicité de moyens, vise à établir avec les lecteurs des relations toujours expansibles et dépourvues de toute construction fictive. Ainsi, l'intégration des nouvelles technologies à la conduite engagée de l'écrivaine rend davantage manifeste la présence d'une véritable posture d’auteur, incapable de se tenir à l’écart de son temps et ne concevant son rôle que dans un rapport d’implication avec le monde.

2. Marie Cosnay : la pratique d'une littérature transitive et engagée

« Écrivain prolifique, pulsionnelle » [PENIN, 2012], Marie Cosnay (Bayonne, 1965) est personnellement engagée depuis quelques années dans un travail d’information et de dénonciation des procédures d’éloignement des étrangers mises en place par la politique française de l'immigration. Dans deux publications récentes – l'une, Entre chagrin et néant. Audiences d’étrangers (Éditions Laurence Teper, 2009 ; Cadex Éditions, 2011), en format papier, et l'autre, Quand les mots du récit (Publie.net, 2010), en format numérique - l'autrice relate des présentations d’étrangers en situation irrégulière devant le Juge des libertés et de la détention (JLD) du Tribunal de Grande Instance de Bayonne. L’œuvre est donc le résultat de sa présence hebdomadaire de mai à octobre 2008 à ces séances et recueille tous les récits, les gestes, les paroles qu’elle a notés sur le moment dans son cahier ou dans les pages blanches d’un livre. En partageant avec le lecteur les sentiments d'indignation et de déchirement intérieur qui l'envahissent, l'écrivaine rend compte de la monstruosité de ce qu’elle définit « une machine à expulser », un système complètement replié sur le fonctionnement de ses engrenages qui oublie d’avoir entre ses mains des vies humaines. Ainsi, à travers cette forme primordiale de l’engagement qu’est le témoignage, Marie Cosnay transforme ces récits d’audiences en récits d’existences, et rappelle que la commune appartenance au genre humain exige de la part de chacun la prise en charge des violations des droits que l’on commet en notre nom.

C'est justement la question de la responsabilité civile qui est abordée dans la publication imprimée successive, significativement intitulée Comment on expulse. Responsabilités en miettes (Éditions du Croquant, 2011).3 L’écrivaine reconnaît son appartenance à l’humanité et les liens invisibles qui, nous enserrant les uns aux autres, de gré ou de force, suggèrent la dénaturation et l'irresponsabilité de l’indifférence :

Par rapport à autrui, j’ai à faire. La révolte, je ne sais pas la mener. Le chagrin m’envahit. Je le pense insuffisant, agaçant, inquiétant même, s’il n’est accompagné de mise en question et de travail – tout modeste que soit ce travail. C’est en mon temps et en mon nom que des milliers de migrants d’Asie et d’Afrique sont enfermés dans les prisons modernes de l’Europe. [COSNAY, 2011a : 14]

Pour l'autrice l’engagement représente alors la seule façon d’appartenir au monde: il envahit toutes les fibres de son âme, il se reverse dans sa quotidienneté comme professeur au collège et dans sa participation active à l'intérieur de la Cimade de Bayonne,4 il imprègne enfin chaque instant consacré à la pratique de la littérature. La conviction selon laquelle la littérature a le devoir de participer à la construction de la société et ne peut ni refuser ni renoncer à trouver un ancrage dans la réalité contingente est, d'ailleurs, clairement exposée dans un billet de blog que l'écrivaine rédige dans le cadre d'un commentaire sur la réduction du budget de la Maison des écrivains et de la littérature. Dans ce billet Cosnay se dit touchée par la figure d'Elio Vittorini, qui avouait à son ami Moravia de ne plus pouvoir se consacrer à l'écriture du roman Erica et ses frères face à l'éclatement de la guerre civile espagnole :

Ce n'est pas un point de vue moral, Vittorini ne dit pas que le roman est indécent en périodes troublées, il dit subir avec tristesse cette perte d'intérêt ; son propre livre lui tombe des mains. De cette difficulté, racontée par Vittorini, on retient, outre bien sûr que l'urgence du réel et de l'Histoire nous rattrape, qu'il n'y a pas de forme pour lui, de mise en forme, pas de récits ou de poésie sans un certain rapport au collectif. (…) La guerre civile, les attaques franquistes, ce que vivent les peuples déplacent le geste de l'auteur et son objet d'étude, ou de passion. » [Anima Motrix, 12.07.2014]5

En tant que femme de lettres, Marie Cosnay s'interroge sans cesse sur l’acte même d’écrire et sur les responsabilités qui en découlent. Ainsi, elle reconnaît à la parole écrite un rôle important de contribution au développement de la conscience, rongée et éveillée petit à petit par le pouvoir des mots. Face à la banalisation des violations des droits et des abus de pouvoir perpétrés contre les immigrés irréguliers, tout comme au reniement d’une quelconque implication dans la mise en place de cette politique, Marie Cosnay crie alors l’urgence du témoignage et affirme passionnément la nécessité de revoir le degré d’implication par lequel chacun d’entre nous se sent investi dans la société actuelle. Elle le fait à l'aide de tous les supports disponibles ; ainsi, elle s'approprie les instruments mis à disposition par le Web pour les intégrer dans sa conduite littéraire engagée.

3. Objet/Titre : méls et billets sur la politique française de l'immigration

3.1 Échanger par voie épistolaire électronique

Ce sont, en effet, le désir de s'interroger sur les enjeux véritables de la politique du chiffre et sur la signification profonde de termes puissants tels que « autre », « droit » ou « identité », tout comme le besoin de partager un sentiment d'angoisse écrasant qui poussent Marie Cosnay à adhérer au projet des correspondances littéraires sur la politique française de l'immigration. Conçu par Nicole Caligaris et Éric Pessan, le volume Il me sera difficile de venir te voir (Vents d'ailleurs, 2008) recueille les méls échangés deux par deux entre vingt-six écrivains francophones6 se prononçant sur cette question.

D'un point de vue technique, le principe générateur de la relation qui s'instaure entre chaque participant et son correspondant n'est pas la connaissance réciproque, mais plutôt le sujet de la discussion. D'ailleurs, comme on l'a dit plus haut, Internet - et, par conséquent, tous les instruments de communications nés pour leur insertion dans la Toile - est conçu pour favoriser la mise en contact aussi entre des individus simplement rassemblés autour d'intérêts communs. Ainsi, c'est le sujet de réflexion qui définit le cadre participationnel de la situation d'échange enclenchée par l'activation de liens virtuels : « le courrier électronique (…) est le créateur d'une communauté numérique entre des individus qui, pour la plupart, ne se connaissent pas, mais que le message électronique met automatiquement en rapport » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 130]. Aussi, le mél représente un moyen d'échange aisé et efficace, qui non seulement combine « le sérieux de l'écrit et du discours élaboré » avec « la dignité de l'opinion réfléchie » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 125] mais encore remédie à une absence physique, en réduisant les distances spatiales et en permettant parfois un échange interculturel. C'est le cas, par exemple, de l'expérience vécue par Marie Cosnay ayant entretenu une correspondance avec l'écrivain malgache Raharimanana, qui participe au projet depuis l'île de Madagascar et offre un point de vue interne par rapport au phénomène migratoire :

Dans l'absolu, l'homme s'est toujours déplacé, aucun peuple n'est sorti du ventre de la terre. Chaque individu, par son histoire personnelle, peut être amené à partir, à poser ses bagages ailleurs, pourquoi dès lors stigmatiser l'homme du sud ? (…) Venons-nous avec des armes ? Venons-nous avec la peste ? Je pense qu'on vient juste avec nos couleurs. [LAVAL, 2008]

Les échanges entretenus répondent à la perception d’une nécessité urgente de la part des participants au projet, à savoir celle de crier leur refus de la violence institutionnalisée et intolérable faite aux migrants. C'est dans ce cadre qu'on peut interpréter alors l'emprunt dans la préface des mots que Maurice Blanchot écrivit contre le retour au pouvoir du général de Gaulle en 1958 :

À un certain moment, face aux événements publics, nous savons que nous devons refuser. Le refus est absolu, catégorique. Il ne discute pas, ni ne fait entendre ses raisons. Quoiqu’il reste silencieux et solitaire, même lorsqu’il s’affirme, comme il le faut, au grand jour. Les hommes qui refusent et qui sont liés par la force du refus, savent qu’ils ne sont pas encore ensemble. Le temps de l’affirmation commune leur a précisément été enlevé. Ce qui leur reste, c’est l’irréductible refus, l’amitié de ce Non certain, inébranlable, rigoureux, qui les rend unis et solidaires. [CALIGARIS, PESSAN, 2008 : 9].

Ces écrivains agissent « convaincus qu’écrire c’est faire (…) non pas malgré mais avec nos scrupules : depuis le doute, contre notre sentiment d’impuissance politique et nos interrogations sur la portée de la littérature » [CALIGARIS, PESSAN, 2008 : 9-10]. À ce propos, il n'est pas inintéressant de remarquer que cette expérience de conversations littéraires en ligne a été suivie par la publication en format papier des messages échangés. La publication représente alors non seulement une forme de conservation mais encore un moyen de partage avec la collectivité d'idées et d'opinions à l'origine confidentielles, et elle témoigne d'une volonté forte d'élargir le débat en impliquant la communauté des lecteurs : « L'éffet societal (…), au travers de la publication, est remarquable : le texte (…) est devenu lui-même porteur d'une volonté forte d'éduquer le lecteur » [M. SERGIER, S. VANDERLINDEN, 2012 : 10].

3.2 Se confronter avec soi-même et avec les autres via un blog

Dans l'univers de connexions mis en place par la Toile, l'un des instruments de communication les plus exploités au monde est le weblog7, désormais connu par sa contraction en blog,8 dont le nombre a suivi un parcours ascendant, de pair avec le développement d'Internet et la simplification progressive des dispositifs à l'intention de l'usager.

Étant donné la multiplicité de contenus et d'objectifs qui peut caractériser un blog, il s'avère difficile d'en donner une définition exhaustive fondée sur des paramètres univoques de discriminations. Toutefois, l'origine étymologique de ce mot-valise contient en elle-même le sens ontologique de ce dispositif. L'expression weblog dérive, en effet, du langage maritime du XVIIIe siècle. Le log, qui en anglais signifie « trace » et, donc, par extension, « journal », était un morceau de bois fixé à un câble caractérisé par des nœuds équidistants permettant, une fois jeté à la mer, de mesurer la vitesse des navires en fonction du nombre des nœuds glissés dans une unité de temps établie. Les données collectés étaient donc notées dans un journal de bord, dénommé logbook ou plus simplement log. Dans le monde de l'informatique cette expression a ensuite été adoptée pour indiquer un fichier qui, de façon automatique, met à jour toutes les opérations effectuées par un ordinateur et vérifie le bon fonctionnement de l'outil technique.

Le blog est, par conséquent, un espace virtuel d'expression qui permet de publier au jour le jour et en temps réel des contenus plurimédiatiques (textes, photos, images, sons), des histoires personnelles, des articles d'information ou des avis et commentaires par rapport à une pluralité de sujets. En fait, il paraît remplir toutes les caractéristiques déjà attribuées à l'Internet, dont il peut en ce sens être considéré un hyponyme. En d'autres termes, le blog permet aussi bien l'écriture du moi que l'instauration de relations à l'origine de communautés virtuelles développées autours d'intérêts partagés et permettant aux internautes de trouver, dans ces lieux intangibles de communication et confrontation, l'occasion « d'éprouver la valeur collective [d'un] attachement personnel » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 135].

Cette double fonction tout comme la possibilité de lire et commenter le blog d'autrui - en raison d'une rédaction se réalisant en ligne - justifient les définitions alternatives de journal intime-collectif ou journal intime-public, forgées par Anne Cauquelin [2003 : 46], et constituent déjà en elles-mêmes une forme de partage, « l'appropriation par d'autres usagers de cet espace personnel » réduisant « la dimension intime de la représentation de soi dont le blog est l'occasion » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 206]. Aussi, la recherche littéraire a envisagé la possibilité d'un rapprochement entre le blog et le genre textuel de la lettre, en raison, d'une part, du partage de l'articulation du temps selon le calendrier, de l'autre, de l'existence d'une même interrogation de soi et de la présence d'un destinataire. La fonction de dialogue résulte, par conséquent, déjà inscrite dans la nature du blog.

C'est en effet en raison de sa qualité d'amalgame sans dissonance conceptuelle entre individualité, interactivité, partage et confrontation, que le blog a été souvent exploité dans le but d'atteindre des objectifs non attribuables à la sphère privée. Nombreux sont en effet les exemples d'utilisation des blogs à des fins pédagogiques, sociaux, commerciaux ou bien politiques. D'ailleurs,

[...] l'environnement technique n'est pas neutre et sa configuration autorise certaines actions plutôt que d'autres. Le support numérique a des caractéristiques particulières qui lui permettent de produire des contenus, les dupliquer et les faire circuler à grande échelle. [MABI, THEVIOT, 2014 : 14]

Dans le contexte politique, notamment, de nombreuses études se sont penchées sur le rapprochement entre cet « espace de communication intersubjectif médiatisé » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 210] et la question de l'engagement citoyen. La structure réticulaire qui caractérise Internet tout comme la notion d'horizontalité sur laquelle il se fonde permet, en effet, de repenser le fonctionnement de la démocratie à une époque où certaines barrières spatiales, temporelles et même sociales s'effondrent. Les citoyens reconnaissent en la Toile, qui pose comme principe la compétence argumentative de chacun, non seulement une ressource cognitive, en raison des données à titre informatif qu'elle contient, mais encore un moyen d'échange d'opinions élargissant les modalités de prise de parole et permettant aussi la manifestation publique de ses opinions grâce, par exemple, au système des pétitions en ligne [MABI, THEVIOT, 2014 : 14]. Ainsi, « ces “petites” conversations finissent par croiser les “grandes” conversations et donner une forme nouvelle d'action collective, opportuniste, sans centre, volatile et puissante » [DACOS, 2010].

Marie Cosnay aussi dispose d'un blog et il répond à un besoin réel de questionnement, de communication et de partage par rapport à des thématiques urgentes de l'époque actuelle. Le blog est disponible à l'adresse https://blogs.mediapart.fr/marie-cosnay/blog et il est accueilli par le journal numérique indépendant Médiapart.9

fochesato 1

Image 1 : la page d'accueil du blog de Marie Cosnay.

La page d'accueil se caractérise par une structure simple et claire, divisible, en raison d'exigences de description, en deux sections verticales : sur la gauche, après l'indication concernant le nombre des « followers » et au-dessous de l'image choisie pour l'en-tête (qui, dans ce cas, est un paysage marin représentant probablement l'Océan Atlantique aux alentours de Bayonne), se déploie, selon une organisation chronologique inverse, la liste des billets publiés ; sur la droite, par contre, on trouve, dans l'ordre, les données personnelles de l'autrice (donc, son nom complet et sa ville de résidence), l'indication du nombre des billets publiés (106), des lectures de journal favoris (6) et des contacts (244)10, tout comme la liste des mots-clés identifiant les catégories d'attribution de ses textes en ligne (parmi lesquels : immigration, littérature, Ovide, école, parrhêsia, politique), la liste des derniers billets publiés par d'autres blogueurs et celle des articles plus récents de Médiapart. Aussi, en ce qui concerne la mise en forme des billets, il est intéressant de remarquer que chaque article sélectionné pour la lecture est introduit par un petit résumé mettant en évidence une phrase du texte publié, et il présente en haut l'indication du nombre des commentaires reçus et celui des internautes qui en recommandent la lecture.

Comme déjà mentionné, les sujets abordés dans le blog concernent des questions très débattues dans le quotidien de notre société, à savoir le futur de l'école, la crise économique (avec une mise au point sur la situation grecque), la controverse relative au concept d'identité, le sentiment basque, et, bien évidemment, la politique française de l'immigration. C'est, en effet, sur cette dernière question que s'ouvre le blog : l'écrivaine y reproduit, avec quelques petites modifications, le début de Comment on expulse. Responsabilité en miettes dans lequel Cosnay aborde sans détours la question de la responsabilité civile :

Au mois de novembre 2008, une famille du Kosovo était expulsée de l’aéroport de Biarritz. (..) Il faudrait donner un nom à chacune de ces personnes, rétablir la chaîne des responsabilités, a dit quelqu’un d’entre nous. (…) Établir une sorte de tableau des responsabilités, un tableau des listes de tâches accomplies qui mènent à ce que des enfants soient emportés et que des parents s’évanouissent au seuil de l’embarquement. [Chroniques, 17.01.2010]

On interprète alors volontiers la création du blog comme le désir d'élargir à la fois l'information et le débat, aussi en réponse à un sentiment de malaise déclenché par la conviction de ne pas réussir pleinement dans le témoignage :

[…] Je rendais compte de manière insuffisante d’une politique aberrante et inadaptée, dont les causes s’ignorent et dont les effets sont hélas à prévoir. Je souffrais de l’impossibilité d’exhaustivité, de mon incapacité à suivre la course de l’événement. [COSNAY, 2011b : 10]

La décision de faire appel aux nouvelles technologies rend davantage manifeste cette volonté claire et tenace de dénonciation, parce qu'elle cherche un moyen de lutter au pair contre la xénophobie, la banalisation de la violence et l'effondrement dans la peur médiatisés par les moyens d'information traditionnels. En outre, le choix d'exploiter un instrument numérique raccourcissant, par définition, les distances attribue une valeur supplémentaire à la parole littéraire, qui gagne en authenticité : la publication en ligne se configure, ainsi, comme une prise de responsabilité de la part d'un auteur par-dessus l'édition papier, parce que ce dernier offre ses mots et ses pensées à tout le monde, il les répète fort et clair.

D'après une analyse du blog, il résulte que l'écrivaine publie au moins un billet par mois, souvent plusieurs billets par semaine. La fréquence de l'écriture paraît dépendre de l'existence d'un projet en cours de réalisation: nombreuses sont en effet les interventions en ligne tout au long du voyage accompli en Grèce pour connaître de près et pour comprendre les réalités des centres de rétention administrative et de la crise, ou encore celles qui concernent l'initiative du village basque de Baigorri d'accueillir une cinquantaine de migrants originaires d'Afghanistan, du Soudan, d'Érythrée et du Kenya prêts à demander l'asile politique en France. En outre, il est intéressant de souligner que les billets de Marie Cosnay ne se composent jamais de quelques lignes : ils prennent la forme de textes longs, réfléchis, détaillés dans le partage des pensées et des sentiments. Cet investissement d'énergie témoigne alors d'un engagement affectif fort de la part de l'écrivaine et d'un attachement par rapport aux conséquences de l'écriture. C'est en ce sens qu'il est en effet possible de voir dans le blog non seulement la traduction en termes opérationnels du désir puissant de communication de l'autrice, mais encore la conviction d'une transitivité de la littérature concevant la présence d'un destinataire. À ce propos, un éclaircissement est nécessaire. Le caractère intimiste du blog fait certainement de ce dernier un moyen d'écriture de soi où Cosnay dévoile son intimité, ses réflexions et opinions, mais il se configure aussi comme un dispositif de « délassement et une occasion de gérer [ses] émotions » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 205]. Dans un billet portant sur la question débattue du public, l'écrivaine déclare, d'ailleurs, ne pas viser à amener le lecteur de son côté, en revanche elle cherche à épuiser les sujets qui lui tiennent à cœur, à les comprendre en profondeur à travers le partage. L'échange avec les autres lui offre alors un soutien dans la réflexion, qui trouve ses origines dans un sentiment intime et s'élargit au fur et à mesure de la participation des lecteurs :

Je n’écris pas en pensant à un type de public, je n’écris pas un roman dans l’intention de convaincre, il m’arrive d’écrire pour témoigner, il m’arrive d’écrire des billets de blogs, des textes pour ABCDire. Jamais un de ces textes, je l’espère du moins, je le crois, ne vise à simplifier la réflexion. (…) Ce n’est pas une question où réponse est attendue. C’est de l’ordre de la sensation, la sensation se partage, ne cherche à convaincre personne ni à livrer message. J’en ai besoin puisque c’est l’endroit où je peux dire JE et à partir duquel, après, je dirai le reste. Je fais part d’une sensation, de ma folie. Je ne pense pas un public. Je ne m’en pose pas la question. [En écrivains en écrivant, 12.07.2012]

En effet, il s'avère souvent fort difficile d'établir une ligne de démarcation entre les billets correspondant à une fonction d'autonarration et ceux qui, en revanche, témoignent de la volonté de Marie Cosnay de poursuivre sans jamais céder son engagement. Les deux visées se confondent, parce que le partage de sentiments individuels est toujours la conséquence d'événements supra-individuels en cours d'ancrage dans l'Histoire de l'humanité, ou bien de petites histoires qui croisent cette dernière. C'est le cas, par exemple, des derniers billets publiés dans le blog. Ils portent tous le même titre (Notre espérance), mais, grâce aussi à une numérotation, ils représentent un parcours de réflexion par étapes : en effet, ces articles racontent l'initiative d'accueil de réfugiés à Baigorri, et, en même temps, ils détaillent un projet littéraire en construction, à savoir celui de restituer « cette aventure d'hospitalité » [Notre espérance 1, 19.02.2016] selon une démarche de prise de notes tout à fait similaire à celle ayant donné naissance à Entre chagrin et néant. Audiences d'étrangers. Dans l'annonce de ce dernier quelqu'un pourrait lire en filigrane une forme d'autopromotion, une anticipation par rapport à une rentrée littéraire future11; cependant, on l'interprète volontiers comme un témoignage de bonnes pratiques, le partage d'un exemple concret de gestion humaine et sensible de la question des réfugiés qui intéresse sans exceptions la société actuelle en entier. C'est d'ailleurs l'autrice même qui précise ses intentions dans le cadre d'une réplique au commentaire enthousiaste d'un internaute :

Merci, Amaroutier, c'est exactement ça que je voudrais faire de ce qui traverse nos vies : du récit. Loin de l'idée, alors, posée en grand sur les choses. Loin des idées. Ce que nous font les choses, le raconter. Bouger, tout doucement. Prendre soin des petites choses, prendre soin de nous. Voir que ceci ou cela est possible. Le raconter. Tout près des événements ». [Notre espérance 7, 07.03.2016]

La volonté d'entrer en connexion avec les internautes se manifeste, en outre, à travers le choix d'insérer dans des billets différents des informations concernant une même personne. À ce propos, il suffit de citer les derniers billets disponibles dans le blog, tous intitulés Notre espérance et relatant de l'expérience d'accueil, déjà mentionnée, vécue par le village de Baigorri. Dans les articles publiés du 19 février au 7 mars 2016 des personnes reviennent et elles sont appelées par prénom. Cette caractéristique relève évidemment du rapport de familiarité et de la fréquentation assidue qui se sont établies entre les réfugiés et les bénévoles, groupe duquel Marie Cosnay fait partie, mais le lecteur a l'impression de suivre le parcours de vie d'une personne connue, pour laquelle on se prend d'affection.

D'ailleurs, s'il est vrai que « l'implication personnelle (…) est au principe de la lecture comme de l'écriture » [LEVERATTO, LEONTSINI, 2008 : 136] la décision de se rendre avec une certaine fréquence sur un blog d'auteur constitue un principe d'affiliation, un intérêt confirmé et ratifié lorsque l'on intervient dans le débat en laissant des commentaires. En effet, comme mentionné précédemment, l'intérêt d'un internaute pour un blog ne traduit pas nécessairement une connaissance directe de l'auteur de ce dernier, en revanche il trouve ses origines dans une communauté d'intérêts entre l'initiateur du blog et ses amateurs. Ainsi, entre l'auteur du blog et son lecteur une reconnaissance mutuelle en tant que partenaires s'établit. Dans ce système d'affinités électives l'internaute joue aussi de la possibilité tout à fait fascinante de neutraliser non seulement la distance physique qui le sépare de l'auteur, mais encore l'écart social parfois perçu : l'écrivain devient quelqu'un avec lequel on peut véritablement discuter, il se fait proche ; ses mots et ses pensées ne restent pas coincés dans les limites d'une page (concrète ou virtuelle), au contraire ils débordent de cette dernière. « La magie ordinaire d'Internet réside », d'ailleurs, « dans cette possibilité de rencontre (…) avec l'auteur (…) dont il nous retransmet, malgré la distance, la présence » [LEVERATTO et LEONTSINI, 2008 : 120].

Dans le cas des blogs hébergés par Médiapart, cette possibilité d'affinité élective est concevable aussi dans la mesure où ce journal indépendant se fait porteur d'une vision alternative de l'information : ses abonnés forment alors une communauté virtuelle, intégrée par les lecteurs partageant les mêmes idées et se réunissant dans l'espace du journal en ligne.

Le blog de Marie Cosnay est suivi par 197 abonnés, les seuls, en fait, autorisés à laisser des répliques à ses billets. À ce propos, une spécificité de Médiapart est à mettre en évidence : bien que tout internaute puisse avoir accès aux échanges se déroulant sur les blogs, leur intégration par le truchement de commentaires est réservée aux abonnés. Cette exigence pose certainement une limite aux potentialités du dispositif, mais elle n'empêche pas le partage des coordonnées d'un blog d'intérêt sur d'autres réseaux tels que Twitter, Facebook ou Google+ : le résultat envisageable est donc celui d’information parsemée et d'un débat toujours extensible en termes de taille et d'espaces virtuels de confrontation.

Par ailleurs, en référence à Marie Cosnay, cette règle ne réduit pas l'engagement dans le témoignage ni la volonté de mobiliser la conscience de tout lecteur. La structure dialogique du blog reste, en effet, inchangée. Elle ressort du fait que l'écrivaine ne se contente pas de partager ses réflexions à travers leur publication en ligne, mais elle participe aux discussions des abonnées engendrées par ses billets-mêmes, en construisant un va-et-vient de réponses que la relation texte-image sur laquelle se fonde le numérique rend visible sous la forme d'une sorte d'escalier :

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Image 2 : exemple d'animation du débat de la part de l'écrivaine [De rétentions, d'abérrations (6), 22.07.2014].

Elle est renforcée par le réseau de répliques qui s'établit lorsqu'un internaute commence un échange écrit avec un autre lecteur du blog :

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Image 3 : exemple de réseau de répliques entre lecteurs du blog de Cosnay [Notre espérance (1)/commentaires, 19.02.2016].

Elle se laisse percevoir dans l'habitude de l'écrivaine d'insérer de nombreuses questions dans ses billets, représentant bien évidemment une transposition sémiologique d'auto-interrogations mais aussi l'intention d'interpeller le lecteur :

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Image 4 : exemple de structure dialogique fondé sur un questionnement continu [De rétentions, d'abérattions (6), 22.07.2014)].

Elle se manifeste, enfin, dans les marqueurs communicationnels [DESEILLIGNY, 2006] se cachant dans l'épaisseur des articles du blog et visant à inscrire le lecteur dans le texte en l'impliquant dans une situation de communication. C'est le cas, par exemple, de l'adresse directe (« à vous aussi, lecteurs ») et de l'indicateur d'émotion (« hélas ») qui apparaissent dans l'introduction à la lettre rédigée - aussi au nom des autres migrants - par un détenu du camp de Corinthe à l'intention des députés européens12 et reproduite en entier dans un billet de blog par Marie Cosnay :

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Image 5 : exemple n. 1 de marqueurs communicationnels [Nous vous adressons un appel vibrant, 31.10.2014].

À ce propos et en guise d'exemple, on reproduit aussi le deuxième billet rédigé en relation à la proposition de renonciation à la nationalité française. Cosnay non seulement s'adresse directement aux lecteurs à travers l'utilisation de pronoms personnels (« nous vous engageons ») et de verbes à l'impératif (« rendez-vous sur le blog ») mais encore renforce l'idée de communauté virtuelle par le truchement du pronom personnel « nous », comme pour creuser davantage la distance qui sépare les dissidents des xénophobes. En outre, la décision de signer son billet uniquement par son prénom (« Marie ») rend manifestes l'horizontalité et le sentiment de proximité qui caractérisent sa relation avec les lecteurs-internautes :

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Image 6 : exemple n. 2 de marqueurs communicationnels [Renvoi de nos cartes d'identité, 26.09.2010].

Le travail d'information et d'éveil de la conscience mené par Marie Cosnay trouve une réponse positive de la part de beaucoup de lecteurs.13 Le blog étant un espace de libre expression et de confrontation, des positions critiques et contraires ne manquent évidemment pas, mais parmi ces dernières s'élèvent aussi les voix d'autres blogueurs qui adressent à l'écrivaine leurs remerciements sincères et passionnés, et la prient de continuer avec son travail de témoignage et avec le partage de ses réflexions : « Votre blog aborde bien des sujets qui me captivent. Je vous suivrai assidûment. Et je vais de ce pas vous recommander à mon amie (...), nouvelle venue ici et elle aussi écrivain » [En écrivains, en écrivant/commentaires, 01/10/2012) ; « Merci pour votre témoignage, j'attends la suite avec impatience » [Notre espérance (1)/commentaires, 19.02.2016] ; « (…) j'ai confiance dans notre solidarité. Merci pour ce blog » [Notre espérance (1)/commentaires, 20.02.2016] ; « (…) merci pour ces billets successifs dans lesquels, à travers vos mots précisément, se propage l'émotion » [Notre espérance (7)/commentaires, 07.03.2016].

4. Conclusion

En espérant de faire, « même de manière infime, bouger le réel » [COSNAY, 2011], Marie Cosnay s'engage avec tous les moyens possibles dans le témoignage. Ses efforts en tant qu'individu et écrivaine interpellent le lecteur et l'invitent à transformer l'information reçue en source de réflexion et de mise en discussion des ses certitudes. L'ouverture d'un blog d'écrivain représente, dans ce contexte, la manifestation d'un besoin profond de confrontation avec les autres et d'une volonté forte d'élargir le débat. La nature du blog permet d'ailleurs l'instauration d'une véritable communication entre les internautes, interprétable selon le « le schéma béhavioriste du type stimulus – réponse » [FRYČER, 1977 : 24] en raison de la possibilité pour le lecteur de réagir aux propos de l’auteur : la pratique de l’affichage de messages et commentaires sur le Net transforme en effet la communication d’unilatérale et potentielle à bilatérale et effective. De plus, s’agissant aussi de lecture, le blog surmonte l’obstacle à la réflexion constitué dans les médias traditionnels par la rapidité des messages défilant sur l’écran ou sur la bande radiophonique, en respectant les rythmes personnels de l’internaute et en lui concédant, donc, le temps nécessaire pour prendre conscience des dérives de l’actualité et éveiller son sens de la responsabilité.

Ainsi, Marie Cosnay poursuit dans le monde du virtuel son engagement dans la réalité contingente. Elle le fait en exploitant la capacité des nouvelles technologies d’élargir les occasions et les espaces pour le tissage de relations et l'échange d'informations, tout en rejoignant un public de plus en plus vaste. Son blog fonctionne, alors, comme une véritable caisse de résonance de ses idées et des valeurs qu’elle soutient.

Bibliographie et sitographie

N. CALIGARIS, E. PESSAN (dir.), Il me sera difficile de venir te voir. Correspondances littéraires sur les conséquences de la politique française de l’immigration, Vents d’ailleurs, 2008.
D. CARDON, La démocratie Internet. Promesses et limites, Éditions du Seuil, « La république des idées », 2010.
M. COSNAY, Entre chagrin et néant. Audiences d’étrangers, Paris, Éditions Laurence Teper, 2009, version en ligne chez Cadex Éditions (2011), URL : http://www.cadex-editions.net/Entre-chagrin-et-neant-audiences-d-etrangers.
M. COSNAY, Comment on expulse. Responsabilités en miettes, Éditions du Croquant, 2011.
A. CAUQUELIN, L'exposition de soi. Du journal intime aux Webcams, Paris, Éditions Eshel, 2003.
M. DACOS, « Dominique Cardon, La démocratie Internet. Promesses et limites », Lectures (comptes rendu), 2010, publié le 19 octobre 2010, URL : http://lectures.revues.org/1162.
O. DESEILLIGNY, « Les marqueurs communicationnels dans les journaux personnels en ligne », Communication et langages, n. 150, décembre 2006, p. 17-33, URL : http://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_2006_num_150_1_5354.
F. JAROSLAV, « La littérature comme acte de communication », Études romanes de Brno, v. 9, 1977, p. 23-35, URL : https://digilib.phil.muni.cz/handle/11222.digilib/113581.
M. LAVAL, « Il me sera difficile de venir te voir », Télérama, publié le 20 décembre 2008, URL : http://www.telerama.fr/livre/il-me-sera-difficile-de-venir-te-voir,37280.php.
J.-M. LEVERATTO, M. LEONTSINI, Internet et la sociabilité littéraire, Nouvelle édition [en ligne]. Paris, Éditions de la Bibliothèque publique d’information, 2008.
C. MABI, A. THEVIOT, « Présentation du dossier. S'engager sur Internet. Mobilisations et pratiques politiques », Politiques de communication, n. 3, v. 2, automne 2014, p. 5-24, URL : www.cairn.info/revue-politiques-de-communication-2014-2-page-5.htm.
P. PENIN, « Marie Cosnay et le monde », SudOuest, publié le 8 avril 2012, URL: http://www.sudouest.fr/2012/04/08/marie-cosnay-et-le-monde-682273-3350.php.
A. PRSTOJEVIC, « La responsabilité de l'écrivain. Entretien avec Gisèle Sapiro à propos de son livre La Responsabilité de l'écrivain. Littérature, droit et morale en France (XIXe – XXIe siècle), Paris, Seuil, 2011 », Vox-poetica, publié le 7 juin 2011, URL: http://www.vox-poetica.org/entretiens/intSapiro.html.
M. SERGIER, S. VANDERLINDEN, « Le journal d'écrivain. Les Libertés génériques d'une pratique d'écriture », Interférences littéraires/Literaire interferenties, n. 9, novembre 2012, URL: http://dial.uclouvain.be/downloader/downloader.php?pid=boreal:118609&datastream=PDF_01.
D. VIART, B. VERCIER, F. EVRARD, La littérature française au présent. Héritage, modernité, mutations, Paris, Bordas Éditions, 2008.


Notes

↑ 1 Cette revue accueille un autre article portant sur la production littéraire de Marie Cosnay, dont les coordonnées sont les suivantes : Elisa BRICCO, La responsabilità dello scrittore oggi: Marie Cosnay testimone nei tribunali di Bayonne, Lingua e Diritto. La Lingua della Legge, la Legge nella Lingua, Publifarum, n. 18, pubblicato il 13/03/2013, URL: http://publifarum.farum.it/ezine_articles.php?id=257.

↑ 2 Depuis la fin des années 1970 la littérature française connait un moment d'effervescence et de renouvellement remarquable, marqué par l'imposition sur la scène littéraire d'une nouvelle conception de l'écriture : en empruntant les mots de Dominique Viart, « il ne s'agit plus en effet d' “écrire” - au sens absolu du terme – mais bien d'écrire quelque chose qui relève du réel, du sujet, de l'Histoire, de la mémoire, du lien social, ou encore de la langue ». À ce propos : Dominique Viart, Fictions en procès, dans Bruno Blanckeman, Aline Mura-Brunel, Marc Dambre, Le roman français au tournant du XXIe siècle, Presses Sorbonne Nouvelle, 2004, p. 29.

↑ 3 Étant donné que les volumes Entre chagrin et néant. Audiences d'étrangers et Comment on expulse. Responsabilités en miettes ont été également publiés en 2011, dorénavant le premier sera indiqué par la formule « COSNAY, 2011a » alors que au second on fera référence à travers les coordonnées « COSNAY, 2011b ».

↑ 4 La Cimade est une organisation de solidarité active envers les individus dont la dignité et les droits sont niés ou mis en danger. Elle se configure comme un réseau d'aide composé d'adhérants, de bénévoles et de sympathisants qui met en place des activités d'accueil et de suivi des étrangers en situation de difficulté : « La Cimade accueille et accompagne chacune de ces personnes, avec la conviction que l’aide individuelle, la défense d’un seul cas est toujours une manière et un moyen de défendre le droit de tous ». Pour plus d'informations http://lacimade.org/.

↑ 5 Dorénavant les références des billets rédigés par l'écrivaine dans son blog seront insérées entre accolades à la clôture du passage cité ou reproduit, avec l'indication du titre de l'article et la date de publication.

↑ 6 Le projet a vu la participation des écrivains suivants : Jean-Baptiste Adjibi, Kangni Alem, Gustave Akakpo, Arno Bertina, François Bon, Nicole Caligaris, Patrick Chatelier, Sonia Chiambretto, Marie Cosnay, Mourad Djebel, Abdelkader Djemai, Eugène Ébodé, Christophe Fourvel, Brigitte Giraud, Mohamed Hmoudane, Driss Jaydane, Pierre Le Pillouër, Claude Mouchard, Pierre Ménard, Samira Negrouche, Nimrod, Éric Pessan, Nathalie Quintane, Raharimanana, Aristide Tarnagda, Sayouba Traoré.

↑ 7 Exception faite pour le carnet en ligne dans lequel Justin Hall chroniquait sa vie en 1994, à ses début le weblog était un outil de collecte et de traitement des informations périodiques concernant l'apparition de nouveaux sites en ligne : un sujet humain partageait ses connaissances à travers une liste de liens hypertextuels accompagnés parfois de commentaires personnels. Dans les années 1990 il n'était donc matière que pour les innovateurs. C'est à l’an 1999 qu'on en fait remonter le succès inédit, lié à la naissance d'applications dédiées tels que Blogger permettant la création et la gestion aisées d'un blog même à ceux qui n'ont pas de connaissances approfondies du langage de programmation HTML.

↑ 8 Le mot weblog doit son existence au webdesigner John Barger, lequel l'utilisa en 1997 pour indiquer sa collection de liens : Web + log (journal) signifie en effet « carnet de bord en ligne ». En 1999, Peter Melholz, également webdesigner et fondateur de l'agence Adaptative Path, réduisa ce mot-valise en blog à travers la création de l'expression verbale « we blog ». L'ensemble des blogs présents en ligne est définit blogosphère (« blogosphere » en anglais). Pour mieux comprendre la structure d'un blog, on propose une énumération des éléments principaux le composant: le design graphique du blog est dit thème (« template » en anglais) ; les articles rédigés par l'auteur du blog s'appellent billets (« post » en anglais) et ils sont disposés selon un ordre chronologique inverse de façon à ce que le premier article de la liste soit le plus récent ; les billets sont rangés sémantiquement dans des catégories et identifiés par des liens fixes dits permaliens (« permalinks » en anglais) ; l'espace situé au-dessous de chaque billet et voué à l'accueil des commentaires des internautes est dénommé fil des commentaires (« thread » en anglais) et il est gérable en termes d'authorisation de publication par l'auteur ; la blogroll ou blogoliste, enfin, est la liste de liens vers d'autres blogs avec lesquels il existe une affinité d'idées ou de contenus.

↑ 9 Comme sa page de présentation en ligne le déclare, Médiapart est un journal payant d'information numérique, indépendant et participatif conçu entre la fin de 2006 et le début de 2007 et né de la collaboration entre des journalistes et des spécialistes du Web. Il se constitue comme une réponse à la crise démocratique, économique et morale qui affecte le monde de l'information en France et propose un renouvellement des relations entre lecteurs et journalistes à travers la mise en place d'un ensemble d'outils de coopération en ligne visant à la trasparence et à la qualité de l'information. À l'intention de ses abonnés il met à disposition un espace dénommé « Le Club », qui est « à la fois réseau social et plateforme de blog » et qui se configure comme « un lieu d'information, de débats, d'échanges et de discussions, respectueux de la liberté d'expression, du pluralisme et de la réputation ou des droits d'autrui. Pour approfondir ce sujet: https://www.mediapart.fr/qui-sommes-nous ; https://blogs.mediapart.fr/charte-de-participation.

↑ 10 Les données indiquées font référence à la date de la dernière consultation du blog de l'écrivaine, à savoir le 7 mars 2016.

↑ 11 Marie Cosnay dispose, en fait, d'un autre blog (http://marie-cosnay.maison-des-ecrivains.fr/) hébergé dans le site de La Maison de l'écrivain et de la littérature. Dans ce cas, toutefois, l'outil technologique se configure prioritairement comme un espace d'autonarration que l'autrice exploite pour faire part au lecteur de toutes ses activités intellectuelles : elle publie des nouvelles sur ses œuvres (qu’elle accompagne de liens conduisant aux articles de presse et aux comptes rendus relatifs), elle insère quelques extraits de ses traductions du grec et du latin, elle informe sur les événements culturels de sa région. Cosnay ne renie quand-même pas son esprit dialogal, qui se manifeste par la possibilité de contacter l'écrivaine en lui adressant un mél : « Il suffit de m'écrire » [ http://marie-cosnay.maison-des-ecrivains.fr/?page_id=464].

↑ 12 Les indices d'allocution construisant la structure d'appel ne sont bien évidemment pas identifiables que dans les billets portant sur la politique française de l'immigration. Au sujet, un exemple est fourni par le message que Marie Cosnay adresse directement à « une merveilleuse éditrice » à propos d'une initiative de défense des métiers du livre : https://blogs.mediapart.fr/marie-cosnay/blog/300912/lettre-i-merveilleuse-editrice.

↑ 13 Plusieus chercheurs continuent de se pencher sur la relation existant entre le Web et la participation des citoyens. Les plus pessimistes soutiennent que les pratiques politiques en ligne se contentent de faire croire à l'internaute qu'il participe, d'autres, en revanche, font remarquer une différence entre communication et participation : le simple partage d'une annonce politique relèverait du premier concept, alors que la publication d'un billet ou d'un commentaire tout comme le simple fait de cliquer sur le bouton « I like » de Facebook serait attribuable à la seconde catégorie. Pour plus d'information sur ce sujet : D. CARDON, La démocratie Internet. Promesses et limites, Éditions du Seuil, col. « La république des idées », 2010.

Pour citer cet article :

Anna FOCHESATO, Marie Cosnay : pratiquer l'engagement littéraire à travers les TIC, Du labyrinthe à la toile / Dal labirinto alla rete , Publifarum, n. 26, pubblicato il 31/05/2016, consultato il 20/04/2024, url: http://www.farum.it/publifarum/ezine_articles.php?id=362

 

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